Mes nuits avec Simone - Racing Club de Strasbourg Alsace
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31/10/2018

Mes nuits avec Simone

Maintenant, Simone a des doutes. Mardi soir, j’ai bien traîné à la Meinau avec les copains. Les derniers à sortir du Salon des Trophées, deux bières dans la musette. Dans la nuit froide, vers la sortie, on a croisé Marc Kelller. Le match de Lille était déjà derrière lui. Il parlait de Toulouse. Il disait « Difficile, important ».

Bref. Je rentre. Pas loin d’une heure du matin. Presque un sans-faute. Fermé la porte sans bruit. Traversé le couloir lumière éteinte. Brossage des dents discret. Tout bien jusqu’à ce que je me prenne les pieds dans le pantalon. Me cogne à l’armoire. Merde. La voix de Simone : « Tu fais quoi, bordel ? ». Et la suite. Inévitable. « T’as vu l’heure qu’il est ? ».

J’explique. Coupe de la Ligue. Coup d’envoi à 21 heures. Je précise : « 05 ». « Tu sens la bière » me morigène-t-elle alors que je tente un bisou d’apaisement. « Tu me prends pour qui ? Tu crois que je ne vois pas que tu as changé ? Toujours de bonne humeur, rigolard. Ne me dis pas que c’est le foot et ton équipe qui gagne un match sur quatre ».

Gentiment, j’égrène : « Cette saison, c’est mieux. On vient de gagner les quatre derniers matches chez nous. On n’a plus perdu depuis cinq matches et un seul sur les dix derniers si on compte tout, Championnat, Coupe de la Ligue et Amicaux. C’est pour ça que je suis de bonne humeur. Tu peux comprendre ça ? ».

Il faut dire, Simone ne capte rien au foot. Elle croit toujours qu’Arsenal est une base militaire de Londres et Deschamps, le ministre de l’agriculture. En plus, elle me soupçonne, c’est évident. « Un soir, je vais te suivre. Comme ça, je saurai où et pourquoi tu passes des soirées aussi joyeuses ». Je saisis la balle au bond : « Avec plaisir. Viens avec moi. Tu verras, c’est génial. A la fin, les joueurs font la fête avec le public ». « C’est ça, prends-moi pour une débile ».

Je m’endors finalement, peiné de tant d’injuste méfiance. Comme toutes les nuits, après les matches, je rêve, je refais la victoire. Je rêve très fort et je parle à voix haute. Je crie les noms des joueurs, j’insulte l’arbitre. Une fois, je me souviens très bien, j’ai hurlé : « Ouais, super, entre les jambes ! ». Ça a réveillé Simone. C’est là que les ennuis ont commencé.

Le matin est arrivé. En général, on se réconcilie quand même. Mais là, rien. Pas un mot, pas un sourire. Un mur. Je fais le café, je prépare les toasts. Je la regarde avec mes grands yeux pleins d’affection. Elle : « Tu as encore parlé cette nuit ». Moi : « Oui, je sais. Désolé ! ». Elle me fusille : « C’est qui cette Carole ? ».

Allez Racing et salut bisame !

Jean-Marc Butterlin a été Chef des Sports du journal « L’Alsace » et Grand Reporter au journal « L’Equipe ». Il est membre du Conseil d’Administration de l’Association Racing Club de Strasbourg Alsace.