02/05/2022
Né le 6 mai 1941 à Sarajevo, Ivica Osim aurait eu 81 ans vendredi prochain. La nuit est tombée sur le phare du Racing de la décennie 1970/80. Sur l’un des plus beaux joueurs qui ait foulé la pelouse de la Meinau, l’un des plus attachants aussi, d’une immense intelligence sur le terrain et dans la vie. Il a été de ces hommes au talent supérieur mais habité aussi d’une rare humilité, se considérant tout juste comme un joueur comme les autres, lui qui était tout sauf ça.
Ivica Osim, footballeur et philosophe (à ses débuts en 1950 au Zeljeznicar de Sarajevo, il suivait en parallèle des études de philosophie), débarque à Strasbourg en 1970, libre enfin de quitter la Yougoslavie, juste après que le Racing et l’AS Vauban ont fusionné. Avec le nouveau RPSM, Osim connait la descente avant, la saison suivante, une remontée fantastique, un cavalier seul durant lequel Marco Molitor marque 40 buts avec on ne sait combien de passes décisives d’Osim.
Ivica était très grand, d’une fausse lenteur miraculeuse puisqu’elle donnait de la vitesse au jeu, éliminant en marchant, ou presque, les adversaires collés à ses basques. Le public l’a aimé tout de suite, intensément, comprenant mal qu’on le laisse partir. A Sedan, la même magie se produira.
Osim revient en 1976, à 35 ans, aide à une nouvelle remontée, portant une génération qui allait bientôt devenir championne de France. Le corps meurtri, il met fin à sa carrière en 1978. Certains, de plus en plus rares, se souviennent d’un Yougoslavie-France (5-1) en quart de finale de la Coupe d’Europe des Nations 1968 et de son récital, véritable ode au football.
Devenu entraîneur, Ivica connait ensuite une vie de gloire, de désordre, de renaissances, qu’il aura traversée, toujours la tête un peu penchée de côté, habité d’un pessimisme qui allait sans doute bien avec sa lucidité.
Il fait briller le Zeljeznicar, le club de son cœur, mène l’équipe olympique yougoslave sur le podium des JO de Los Angeles, conduit la sélection de son pays en quart de finale de la Coupe du Monde 1990, battue aux tirs au but par l’Argentine de Maradona.
C’est alors la guerre civile qui déchire son pays. Osim, loin de sa famille, s’exile en Grèce, au Panathinaikos avant de rejoindre le Sturm Graz, en Autriche, en 1994, qu’il mène en Ligue des Champions en 2000. En 2002, il s’envole pour le Japon, entraîne le JEF United d’Ichihara. Il est appelé à la tête de la sélection nippone en 2006, emmène Eiji Kawashima à la Coupe d’Asie des Nations 2007.
💬 𝙀𝙞𝙟𝙞 𝙆𝙖𝙬𝙖𝙨𝙝𝙞𝙢𝙖 : “𝙄𝙡 𝙢’𝙖 𝙗𝙚𝙖𝙪𝙘𝙤𝙪𝙥 𝙖𝙥𝙥𝙧𝙞𝙨”
Footballeur de talent au Racing, Ivica Osim a aussi été le premier sélectionneur d’Eiji Kawashima avec le Japon.
Eiji se souvient d’un homme qui lui a beaucoup apporté au début de sa carrière ⤵️ https://t.co/yulZRmss0f pic.twitter.com/AxxRGErgC4
— Racing Club de Strasbourg Alsace (@RCSA) May 2, 2022
Malheureusement, il est victime d’un accident cardiaque et doit mettre un point final à sa carrière. Revenu à Graz, c’est dans la ville autrichienne qu’il a quitté ce monde qui l’interrogeait tellement, qui donnait de la tristesse à son regard et l’obligeait à d’autant plus de bienveillance. Devant un tel géant, de talent et d’humanité, on s’incline avec une infinie tristesse.
Pour Léonard Specht, Président de l’Association et des Anciens du Racing, ancien coéquipier d’Ivica Osim, « c’est un très grand monsieur du football qui nous a quittés. Un joueur de classe mondiale. Sans lui, nous ne serions pas montés en 1977, avant de devenir Champions de France deux saisons plus tard. Nous sommes tous un peu ses fils. Je me souviens qu’après les entraînements, il voulait toujours finir par un tennis-ballon et qu’il était imbattable. De lui, nous gardons aussi le souvenir d’un homme d’une extrême gentillesse, d’une simplicité et d’une humilité totales. Un homme et un footballeur rare comme le Racing n’en a pas connu beaucoup au cours de sa longue histoire ».
Crédit photos : DNA / Jean-Luc Ryckelync