Ce vendredi matin… - Racing Club de Strasbourg Alsace
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23/05/2016

Ce vendredi matin…

Ce vendredi matin, il se lève. Regarde le ciel. Plutôt gris. La journée va être longue. Il a pris une journée de RTT. Les potes du bureau l’ont chambré : « T’as pris une Racing Temps de Travail ? ». Un peu ça, en fait. Ces quinze derniers jours ont été interminables. Une semaine à digérer Amiens. Il se revoit debout dans le kop, chantant « On est en Ligue 2, on est en Ligue 2 ». Et ces cinq secondes d’absence. Et ce but à la con. Un coup de massue sur la tête. Et ce silence, soudain. La Meinau glacée. Humeur de chien tous les jours après. Engueulades avec les copains. « Fais pas la tronche ! Tu verras, même si on perd les deux derniers matches, ça va le faire. Les autres vont lâcher des points aussi », ils ont dit.

Il s’est senti un peu seul, vraiment. S’est repassé dans la tête d’incroyables affaires. France-Bulgarie, Bayern-Chelsea, les titres du Bayern et de Manchester City arrachées dans les dernières secondes. L’autre nuit, il a rêvé de Jean-Marc Furlan. Un cauchemar de onze défaites de suite pour un plongeon inimaginable. Il se souvient de Montpellier, de Colomiers. Il a vu la vie en noir, tout à fait. Il a même fini par s’isoler. Quand il est resté devant sa télé à regarder la Pro D2 de rugby, il a pris conscience de son état, enfin. Depuis quelques jours, ça va bien mieux. L’autre jour, il est allé à l’entraînement, s’est retrouvé parmi 200 supporters, ça lui a fait du bien. Le moral est remonté en flèche. Il est rentré chez lui. Coup d’œil sur le classement. Finalement, on a les choses bien en mains, il a pensé.

Il s’est fait son programme. Petit footing tout à l’heure. Repas normal : beckahofa avec un verre de pinot noir. Pas de dessert. Petite sieste, peut-être. Départ pour Belfort dès 15 h. Dany, Luc et Edouard passent le prendre. Il mesure exactement la dimension d’un possible bonheur : 151 kilomètres ! 151, comme la Gallery qu’il a visitée un jour à New York. Il imagine un tableau bleu et blanc d’hommes en liesse venant le saluer, lui et les 2000 autres fans du Racing.

Il n’a plus peur ce matin. Il a déjà intensément vécu deux montées depuis le CFA2. Il voudrait dire aux joueurs : « Faites pas les cons, prenez ce point qui arrange tout le monde ! ». Il n’en demande pas plus, estime qu’il sera bien temps de penser au titre contre Dunkerque. Mais bon, un match, on ne sait pas toujours comment ça tourne. Un peu de sa vie à lui est liée à ces joueurs qu’il va pousser de toutes ses forces. Pas le principal car il y a la famille, le boulot. Quand même ! Ce vendredi matin, il se lève pourtant avec le cœur gonflé. Il fait confiance à Jacky et à ses hommes pour conduire le peuple alsacien vers la terre promise. Il croit que c’est leur mission, leur responsabilité. Par hasard, l’autre soir, il a relu « Voyage au bout de la nuit » de Louis-Ferdinand Céline. Céline, né un 27 mai. Il y a vu un signe. Une belle date, s’est-il emballé, pour renaître au monde professionnel. Pour un voyage au bout de la joie.

Je vous dis à la semaine prochaine !

Allez Racing et salut bisame !

Jean-Marc Butterlin a été Chef des Sports du journal « L’Alsace » et Grand Reporter au journal « L’Equipe ». Il est membre du Conseil d’Administration de l’Association Racing Club de Strasbourg Alsace.